lundi 25 juillet 2016

Quand le sport devient une arme

"La jouissance des droits et libertés reconnus dans la présente Charte olympique doit être assurée sans discrimination d’aucune sorte, notamment en raison de la race, la couleur, le sexe, l’orientation sexuelle, la langue, la religion, les opinions politiques ou autres, l’origine nationale ou sociale, la fortune, la naissance ou toute autre situation."



Lorsqu'on évoque l'exploitation politique du sport l'image des jeux olympiques de 1936 nous vient à l'esprit. Mais si on observe la manipulation qui est faite aujourd'hui des manifestations sportives par l'oligarchie mondialiste, Adolf Hitler et Goebbels apparaissent comme des propagandistes amateurs !

La popularité naturelle et la médiatisation des événements de haut niveau ont logiquement fait du sport un vecteur privilégié tant pour la publicité commerciale que la propagande politique pou les pays qui accueillent les grandes manifestations sportives. Mais il ne faut pas croire pour autant que l'organisateur ne tire que des bénéfices de cet état de fait, et il est parfois pris en otage par l'événement comme mors des jeux olympiques de Sotchi en 2014 qui ont gelé la politique internationale russe, laissant libre cours au coup d'état organisé sur la Maïdan ukrainien par la CIA.

Aujourd'hui, la nouvelle guerre froide entre Washington et Moscou s'invite dans la préparation des jeux olympiques de Rio, avec une tentative d'exclusion du Comité olympique russe par les USA et le Canada..

Ici, 2 articles publiés par le Saker francophone et qui analysent cette prise d'otage du Sport par la politique russophobe occidentale sur fond de problème de dopage mondial...

On y découvre comment les USA et le Canada dans ce qu'il est convenu d'appeler une parodie d'enquête baclée en 57 jours et bafouant les principes olympiques et de présomption d’innocence, ont orchestré avec le complicité de l'AMA une tentative politique d'exclusion de la Russie des prochains jeux olympiques de Rio sur des témoignages de 3 sportifs passés à l'Ouest et dépendant de leur générosité Le tout bien sûr sur fond de campagne médiatique russophobe et hystérique...

Si finalement l'esprit olympique a finalement pu reprendre le dessus et repousser cette ingérence politique dans les jeux du stade, il ne faut pas se leurrer, car dans le contexte des scandales politico-financiers qui ébranlent déjà et plus profondément que le dopage la probité du sport, c'est bien d'une victoire à la Pyrrhus qu'il s'agit et qui annonce malheureusement pour Rio  plus d'affrontements poilitico-médiatiques que sportifs...
Le seul point commun peut-être entre les futurs JO de Rio et ceux  de Berlin en 1936, c'est qu'ils annoncent, sous des lauriers convoités, critiqués et manipulés, l'arrivée d'une guerre mondiale inéluctable...

Erwan Castel

Vladimir Poutine portant la flamme olympique aux jeux de Sotchi en 2014

Source de l'article, le lien ici : Le Saker Francophone

Washington politise de nouveau les Jeux olympiques

Par Paul Craig Roberts – Le 17 juillet 2016 – Source paulcraigroberts.org

Paul Craig Roberts
Washington et son vassal canadien tentent d’utiliser un scandale de dopage sportif russe créé par les médias occidentaux pour interdire aux Russes de participer aux Jeux olympiques au Brésil. Washington et le Canada font pression sur d’autres pays pour les inciter à participer à la vendetta de Washington contre la Russie. Cette vendetta est menée sous le prétexte de « préserver un athlétisme propre ».

Vous pouvez parier votre vie que Washington n’est pas motivé par le respect de la justice dans le sport. Washington est occupé à l’intérieur du pays à détruire la justice pour les pauvres, et Washington, qui ne tient pas compte de la souveraineté des pays ni du droit international contre l’agression nue, est occupé à l’étranger à détruire des millions de vies à des fins hégémoniques.

Nous pourrions conclure que Washington veut l’hégémonie dans le sport exactement comme il le fait dans les affaires étrangères et veut que les athlètes russes dégagent de son chemin pour que les Américains puissent gagner davantage de médailles. Mais cela manquerait le point véritable de la campagne de Washington contre la Russie. Le scandale du dopage fait partie de l’effort en cours de Washington pour isoler la Russie et construire une opposition à Poutine en Russie même.

Il y a une minorité connue comme les intégrationnistes atlantistes au sein du gouvernement russe et dans le secteur des affaires, qui croit qu’il est plus important pour la Russie d’être intégrée à l’Occident que d’être souveraine. Cette minorité de Russes veut troquer l’indépendance de la Russie contre l’acceptation occidentale. Fondamentalement, ce sont des traîtres que Poutine tolère.

Avec l’interdiction de la participation de la Russie aux Jeux olympiques, Washington tente de renforcer cette opposition à Poutine. Maintenant, l’opposition peut dire : « L’intransigeance de Poutine a mis la Russie à l’écart des Jeux olympiques. Poutine a isolé la Russie. Nous devons coopérer − un euphémisme pour céder − avec l’Occident ou devenir parias. »

C’est le jeu de Washington. L’interdiction des Jeux olympiques est destinée à saper la réputation de Poutine auprès des Russes. « Il nous a écartés des Jeux olympiques ! ».

Les intégrationnistes atlantistes sont prêts à trahir soit Assad soit la Crimée pour être acceptés par Washington. Donc Washington travaille à renforcer ses alliés russes.

Les Européens sont perturbés par la politisation des Jeux olympiques par Washington. Le président du Comité olympique européen Pat Hickey s’est opposé à la tentative de Washington d’imposer une punition « avant la présentation de toute preuve. Une telle interférence et des appels avant la publication du rapport McLaren vont totalement à l’encontre de la procédure légale équitable internationalement reconnue et pourrait avoir complétement compromis l’intégrité et donc la crédibilité de cet important rapport ».

Hickey a dit qu’il ressort clairement de l’effort de Washington et du Canada que « tant l’indépendance que la confidentialité du rapport ont été compromises ». Il poursuit :

« Il est clair que seuls des athlètes et des organisations connus pour soutenir une interdiction de l’équipe olympique russe ont été contactés. »

« Je dois demander en vertu de quelle autorité les agences anti-dopage étasuniennes et canadiennes ont préparé leur lettre et quel mandat elles ont pour lancer un appel international à l’interdiction d’un autre pays dans la famille olympique. »

« Alors que je comprends totalement et partage les préoccupations internationales quant aux récentes allégations de dopage, nous ne pouvons pas permettre à des individus ou à des groupes d’interférer ou de nuire à l’intégrité d’une procédure judiciaire équitable et régulière. »

Washington, évidemment, n’a aucun respect pour les procédures judiciaires régulières aux États-Unis eux-mêmes, ou en Afghanistan, en Irak, en Libye, en Somalie, au Yémen, au Pakistan, en Syrie, en Ukraine, au Honduras, au Venezuela, en Argentine, au Brésil, en Bolivie, en Équateur ou en Grande-Bretagne, un vassal dont Obama dit qu’il ne sera pas autorisé à quitter l’Union européenne. Pourquoi Washington serait-il concerné par le fait que la Russie puisse bénéficier d’une procédure régulière ?

Dans son article, le New York Times, la mère maquerelle du bordel des médias américains, n’a pas mentionné les préoccupations de Hicky.

Le rapport McLaren est censé être une enquête sur l’accusation que l’usage de drogues par les athlètes russes pour améliorer leurs performances est largement répandu et soutenu par le gouvernement russe. Washington a trop d’argent et trop de menaces à disposition pour que n’importe quel rapport utilisé pour discréditer la Russie puisse être honnête. Lisez mon article d’aujourd’hui sur le MH-17, ou souvenez-vous de la description par Washington d’un vote indépendant en Crimée, où les électeurs choisissent à la quasi unanimité de rejoindre la Russie dont la province fait partie depuis les années 1700, comme étant une « invasion et une annexion russe ».

Il faut une personne très courageuse, comme Pat Hickey, pour résister à Washington, et nous ne savons pas si Hickey succombera aux pressions de Washington qui seront très certainement exercées maintenant sur lui.

Washington continuera à diaboliser la Russie jusqu’à ce qu’une guerre soit provoquée ou jusqu’à ce que le gouvernement russe capitule et accepte une vassalité partielle, trahissant soit Assad soit la Crimée.

Peut-être la Russie et la Chine devraient-elles organiser les Jeux olympiques eurasiatiques et quitter les Jeux occidentaux. Comme Washington a relancé la Guerre froide et tente de la faire devenir chaude, la compétition peut porter sur comment les pays d’Amérique latine et d’Afrique s’alignent. S’ils sont libres de choisir, il est peu probable que les Africains et les Latino-américains rejoignent les jeux de l’homme blanc occidental raciste.

Nous devons nous demander quand viendra le moment où la Russie et la Chine cesseront de rester assises là à encaisser des affronts et des provocations sans fin, au nom de la paix. Lorsque ce moment arrivera, s’il arrive, l’Occident cessera d’être l’arbitre des affaires humaines.

Paul Craig Roberts

Traduit par Diane, vérifié par Wayan, relu par Catherine pour le Saker francophone


Source de l'article, le lien ici : Le Saker Francophone

Les Jeux olympiques comme un outil de la nouvelle guerre froide

Le 21 juillet 2016 – Source Oriental Review

Le sixième principe fondamental de l’olympisme (non-discrimination de toute nature, y compris sur la nationalité et l’opinion politique) semble être oublié depuis longtemps. Dans la Grèce antique, la compétition des meilleurs athlètes a été en mesure de mettre fin à une guerre et servir comme un pont de compréhension entre deux ennemis récents. Mais au cours du XXe siècle, les Jeux olympiques sont devenus une arme politique. En 1980, les États-Unis et leurs alliés ont boycotté les Jeux à Moscou comme une protestation contre les troupes soviétiques qui étaient entrées en Afghanistan à la demande du gouvernement légitime de ce pays (en revanche, les Jeux olympiques de l’Allemagne nazie de 1936 ont eu lieu comme d’habitude, sous les applaudissements du monde civilisé).

Le 8 mai 2016, le programme CBS 60 Minutes a diffusé une émission au sujet du dopage en Russie. Les interviews tournaient autour de l’enregistrement des conversations entre un ancien membre du personnel de l’Agence antidopage de Russie (RUSADA), Vitaly Stepanov, et l’ex-directeur du laboratoire anti-dopage de la Russie à Moscou, Grigory Rodchenkov. Ce programme était le quatrième épisode d’une longue série à propos de la prétendue existence d’un système pour soutenir le dopage dans le sport russe.

Quelques jours plus tard, le New York Times a publié une interview avec Rodchenkov. C’est l’ancien fonctionnaire qui affirme qu’un programme de dopage soutenu par l’État était actif aux Jeux olympiques de Sotchi et que la commande de ce programme était venue presque directement du président russe.

Un fait important qui a échappé à la plupart des observateurs internationaux était qu’une campagne médiatique, qui avait commencé peu après 2014 et le profond gel des relations russo-occidentales, a été construite autour des témoignages de trois citoyens russes qui étaient tous interconnectés et complices dans une chaîne de scandales de dopage, et qui, plus tard, ont quitté la Russie et tentent de refaire leur vie à l’Ouest.


Yulia Stepanova
A 29 ans, coureuse de demi-fond, Yulia Stepanova peut être considérée comme l’instigatrice de ce scandale. Le meilleur résultat de cette jeune athlète dans une compétition mondiale a été une médaille de bronze au Championnat d’Europe d’athlétisme en indoor en 2011. Aux Championnats du monde de cette même année, elle a terminé huitième. La carrière de Stepanova a déraillé en 2013, lorsque la commission anti-dopage de la Russian Athletic Federation l’a disqualifiée pour deux ans sur la base de « fluctuations de sang dans son passeport biologique d’athlète ». Ces fluctuations sont considérées comme des preuves de dopage. Tous les résultats de Stepanova depuis 2011 ont été invalidés. En outre, elle a dû rendre l’argent des prix qu’elle avait remportés au cours des courses professionnelles en 2011-2012. Stepanova, qui avait été suspendue pour dopage, a agi comme informatrice principale du journaliste d’ARD Hajo Seppelt, qui avait commencé le tournage d’un documentaire sur l’inconduite dans les sports russes. Après la sortie du premier documentaire d’ARD en décembre 2014, Stepanova a quitté la Russie avec son mari et son fils. En 2015, elle a demandé l’asile politique au Canada. Même après que sa suspension eut pris fin en 2015, Stepanova a dit à la Commission de l’AMA (p.142 du Rapport de l’AMA de novembre 2015) qu’elle avait été testée positive pour dopage lors des championnats d’athlétisme sur piste russe à Saransk en juillet 2010 et avait payé 30 000 roubles (environ 1 000 USD à l’époque) au directeur du laboratoire russe anti-dopage à Moscou, Gregory Rodchenkov, en échange de la dissimulation des résultats des tests.


Vitaly Stepanov
Le mari de Ioulia Stepanova est Vitaly Stepanov un ancien membre du personnel au RUSADA. Il avait vécu et étudié aux États-Unis depuis ses 15 ans, mais plus tard, il a décidé de retourner en Russie. En 2008, Vitaly Stepanov a commencé à travailler pour RUSADA comme agent de contrôle anti-dopage. Vitaly a rencontré Yulia Rusanova en 2009 aux championnats nationaux russes à Cheboksary. Stepanov affirme maintenant qu’il a envoyé une lettre à l’AMA détaillant ses révélations en 2010, mais qu’il n’a jamais reçu de réponse. En 2011, Stepanov a quitté RUSADA. Un fait qui mérite l’attention est que Vitaly a avoué qu’il était pleinement conscient que sa femme prenait des substances interdites, alors qu’il travaillait pour RUSADA ainsi qu’après avoir quitté cette organisation. Prenez note que les tests sanguins de Stepanova ont commencé à être positifs en 2011  à savoir à partir du moment où son mari, un officiel de la lutte anti-dopage, a quitté RUSADA. En toute conscience, les Stepanov, maintenant mariés, ont accepté des prix dans des courses professionnelles jusqu’à que Yulia soit disqualifiée. Ensuite, ils ont perdu leur source de revenus et ont soudainement dû rendre l’argent des prix, à tel point que Vitaly Stepanov a demandé le recours à des journalistes étrangers, en offrant de leur dire la « vérité au sujet des sports russes ». Début juin, il a admis que l’AMA avait non seulement aidé le déménagement de sa famille en Amérique, mais leur avaient aussi fourni $30 000 d’aide financière.


Gregory Rodchenkov
Et enfin, la troisième figure dans cette campagne visant à exposer le dopage dans le sport russe est l’ancien chef du laboratoire anti-dopage russe à Moscou, Gregory Rodchenkov. Selon Vitaly Stepanov, il était l’homme qui a vendu des drogues améliorant la performance tout en aidant à cacher leurs traces, et était également venu avec l’idée de « dopage oral noyé dans le Chivas » (p. 50), une technique qui transforme les hommes en champions olympiques. Ce natif de Moscou de 57 ans est reconnu pour être le meilleur dans ce qu’il fait. Il est diplômé de l’Université d’État de Moscou avec un Ph.D. en chimie et a commencé à travailler dans la lutte contre le dopage au laboratoire de Moscou dès 1985. Il a ensuite travaillé au Canada et pour les entreprises pétrochimiques russes, et en 2005, il est devenu le directeur du laboratoire antidopage national de Russie à Moscou. En 2013, Marina Rodchenkova – la sœur de Gregory Rodchenkov – a été reconnue coupable et a été condamnée pour la vente de stéroïdes anabolisants aux athlètes. Son frère a également fait l’objet d’une enquête criminelle sur des accusations qu’il aurait fourni des substances interdites. Menacé de poursuites, Gregory Rodchenkov a commencé à se comporter bizarrement et a été à plusieurs reprises hospitalisé et « soumis à un examen psychiatrique ». Une conclusion a ensuite été présentée au tribunal, affirmant que Rodchenkov souffrait de « troubles de la personnalité schizotypiques », aggravés par le stress. En conséquence, toutes les accusations portées contre Rodchenkov ont été abandonnées. Mais la chose la plus surprenante est que quelqu’un présentant un trouble de la personnalité schizoïde et avec une sœur reconnue coupable de trafic de drogues améliorant la performance a continué à exercer en tant que directeur du seul laboratoire antidopage accrédité par l’AMA de la Russie. En fait, il a occupé ce poste pendant les Jeux olympiques de 2014. Rodchenkov n’a été démis qu’à l’automne 2015, après l’éruption du scandale qui avait été lancé par l’ARD et les Stepanov suite à la diffusion télévisuelle. En septembre 2015, la commission de l’AMA a accusé Rodchenkov d’avoir détruit intentionnellement plus d’un millier d’échantillons afin de dissimuler le dopage parmi les athlètes russes. Il a personnellement nié toutes ces accusations, mais a démissionné et est parti pour les États-Unis où il a été chaleureusement accueilli par le cinéaste Bryan Fogel, qui tournait encore un autre documentaire produit sur commande sur le dopage en Russie.


Richard H. McLaren
Au moment ou cet article est écrit, le Comité international olympique (CIO) étudie un rapport d’une personne indépendante, le professeur canadien Richard H. McLaren, qui a accusé l’ensemble de la Fédération de Russie, et pas seulement les athlètes individuels, de complicité dans l’utilisation des drogues améliorant les performances. McLaren a été rapidement appelé à parler avec l’AMA peu après que le NYT ait publié l’interview avec Rodchenkov. L’objectif était clair : concocter un rapport scientifique à la mi-juillet qui fournirait au CIO des motifs pour interdire la participation de l’équipe russe aux Jeux olympiques de Rio. Lors d’une conférence de presse le 18 juillet, McLaren a lui-même reconnu qu’avec un calendrier de seulement 57 jours, il n’a pas pu « identifier un athlète qui aurait pu bénéficier d’une telle manipulation pour cacher des tests de dopage positifs ». La logique de l’AMA ici est claire. Ils ont besoin d’éviter toute accusation de partialité, de non-professionnalisme, d’embellissement des faits ou de partisanerie politique. Peu importe que la duplicité et le mensonge se trouvent dans le rapport, il a été rédigé par une personne indépendante. Point. Cependant, Richard H. McLaren ne cherche pas à cacher que l’ensemble du rapport est basé sur le témoignage d’une seule personne – Rodchenkov lui-même, qui est présenté à plusieurs reprises comme une source crédible et véridique. Bien sûr que l’homme est accusé par l’AMA elle-même d’avoir détruit 1 417 tests de dopage et doit faire face à une extradition vers la Russie pour ses crimes liés au dopage, mais il a vu une occasion de devenir un précieux témoin et un prisonnier de conscience persécuté par le régime totalitaire en Russie.

L’avantage dont jouit cette commission indépendante – dont le rapport sera la base du CIO pour décider du sort des espoirs olympiques de la Russie – est que ses accusations ne seront pas examinées devant un tribunal, le corps de la preuve ne sera pas contestable par les avocats de l’accusé. Il n’y aura aucune présomption d’innocence légale habituelle à l’évidence.

Il ressort de la déclaration du professeur McLaren qu’aucune accusation ne sera portée contre les athlètes russes de manière spécifique. De plus, ils peuvent tous participer s’ils refusent de représenter la Russie aux Jeux olympiques. Il y a des raisons évidentes à cette sélectivité. Professeur de droit et membre de longue date de la Cour d’arbitrage du sport, le professeur McLaren sait très bien que toutes les accusations portées contre des individus spécifiques qui sont faites publiquement et se traduisent par actes juridiques − comme une interdiction de participation olympique − peuvent être et seront contestées devant les tribunaux, conformément au droit international et sur la base de la présomption d’innocence. Tous les éléments de preuve utilisés par l’accusation sont contestables, et si un fait inclus dans ces charges peut être interprété à l’avantage de l’accusé, le tribunal est tenu d’exclure ce fait à partir des matériaux à la disposition de la poursuite.

En tant qu’avocat, McLaren comprend tout cela très bien. Des centaines de procès intentés par des athlètes russes donnant un résultat sans équivoque peuvent non seulement détruire sa réputation mais aussi le ruiner professionnellement – ils pourraient aussi constituer la base d’une enquête criminelle avec des motifs évidents l’accusant de déformer intentionnellement quelques faits qui, à ses yeux peuvent être résumés comme suit.

Durant les Jeux olympiques de Sotchi, un officier du FSB nommé Evgeny Blokhin a échangé les tests de dopage pris sur les athlètes russes contre des échantillons d’urine propres. On dit de cet agent qu’il possédait le code de sécurité d’un entrepreneur en plomberie, ce qui lui aurait permis d’entrer dans le laboratoire. En outre, il est rapporté que Evgeny Kurdyatsev, le chef du Département de l’enregistrement et de l’échantillonnage biologique, a échangé les tests de dopage dans la nuit, à travers un trou de souris dans le mur (!). Celui qui les attendait dans le bâtiment adjacent était l’homme qui a fourni maintenant la preuve crédible – Gregory Rodchenkov – et quelques autres individus anonymes, qui ont passé à Blokhin les tests de dopage propres des athlètes à utiliser pour remplacer les échantillons originaux. Si la qualité spécifique de l’urine propre ne correspondait pas au profil d’origine, elle était adaptée en utilisant du sel de table ou de l’eau distillée. Mais bien sûr, l’ADN était incompatible. Et tout cela se passait dans le seul laboratoire anti-dopage officiel en Russie, accrédité par l’AMA !

Comment quelque chose comme cela pourrait sonner dans un tribunal ? Nous avons des témoins, mais l’équipe de la défense ne peut pas les soumettre à un contre-interrogatoire. Nous ne pouvons pas prouver que Blokhin est un agent du FSB, mais nous le croyons. Nous ne possédons pas les documents originaux – pas une seule photo ou déclaration écrite sous serment de l’examen officiel – mais nous avons des preuves suffisantes d’un seul criminel qui a déjà avoué son crime. Nous ne soumettons pas les e-mails fournis par Rodchenkov à l’examen de tous les experts, mais nous affirmons que les e-mails sont authentiques, que tous les faits qu’ils contiennent sont exacts, et que les noms des expéditeurs sont corrects. Nous ne pouvons pas accuser les athlètes, nous allons accuser et punir l’État!

Pour être honnête, nous ne croyons toujours pas que le mouvement olympique a sombré si bas pour priver des milliards de personnes du plaisir de regarder les compétitions, oubliant la politique et les politiciens. Cela voudrait dire au revoir à la réputation de l’AMA, du CIO et du système mondial du sport dans son ensemble. Peut-être qu’une solution au problème colossal du dopage est attendue depuis longtemps, mais la réponse se trouve-t-elle dans les limites d’un seul pays, même un grand pays comme la Russie ? Faut-il prendre un moment et insister sur l’histoire multi-volume des scandales de dopage dans tous les pays du monde ? Et compte tenu de ces faits qui sont venus à la lumière, n’est-ce pas l’AMA elle-même la pierre angulaire du système existant, système de grande envergure pour soutenir et couvrir le dopage sportif partout dans le monde ?

En conclusion, nous citons ci-dessous la traduction complète de la déclaration du Comité olympique russe en réponse au rapport de l’AMA :

Les accusations portées contre les sports russes trouvées dans le rapport de Richard McLaren sont si graves qu’une enquête complète est nécessaire, avec la participation de toutes les parties. Le Comité olympique russe a une politique de tolérance zéro et soutient la lutte contre le dopage. Il est prêt à apporter son assistance complète et à travailler ensemble, au besoin, avec toute organisation internationale.

Nous sommes totalement en désaccord avec l’opinion de M. McLaren que l’interdiction éventuelle faite à des centaines d’athlètes propres russes de concourir aux Jeux olympiques est une « conséquence désagréable » mais acceptable des charges contenues dans son rapport.

Les charges établies sont principalement basées sur des déclarations faites par Grigory Rodchenkov. Ceci est uniquement basé sur le témoignage de quelqu’un qui est à l’épicentre de cette entreprise criminelle, qui est un coup non seulement pour les carrières et les destins d’un grand nombre d’athlètes propres, mais aussi pour l’intégrité de l’ensemble du mouvement olympique international.

La Russie a lutté contre le dopage et continuera à se battre au niveau de l’État, durcissant régulièrement les sanctions pour toute activité illégale de ce type et faisant respecter un précepte de peine inévitable.

Le Comité olympique russe soutient pleinement les peines les plus sévères possibles contre toute personne qui soit utilise des médicaments interdits ou encourage leur utilisation.

Dans le même temps, le COR, agissant en pleine conformité avec la Charte olympique, s’engage à toujours protéger les droits des athlètes propres. Ceux qui tout au long de leur carrière, grâce à un entrainement incessant, le talent et la volonté, cherchent à réaliser leurs rêves olympiques ne devraient pas voir leur avenir déterminé par des accusations sans fondement, non motivées et les actes criminels de certains individus. Pour nous, c’est une question de principe.

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dimanche 24 juillet 2016

Vers un Turkexit ?

10 jours après ce coup d'état et le grand ménage turc 

La base d'Incirlik en Turquie base principale de l'OTAN en Turquie depuis 1952
Le Président Erdogan, fidèle à ses méthodes "musclées" ne se contente pas de faire un grand ménage chez les putschistes, élargi allègrement à tout le réseau Gülen, accusé d'avoir organisé ce coup d'Etat, il a décidé d'entrer dans une confrontation avec les USA qui ne lui pardonne pas son retour vers l'Eurasie avec une telle virulence qu'on peut se demander s'il ne sont pas mêlés également dans cette tentative de renversement du gouvernement turc...

Cette tension naissante et imprévu entre Washington et Ankara se cristallise autour de la base d'Incirlik, sa garnison américaine et surtout son arsenal nucléaire, et des mouvements des flottes étasuniennes actuellement en Mer Noire et qui feraient route vers les côtes ottomanes...

Quel beau prétexte que la sécurité internationale atomique pour intervenir dans un pays...

  • Hypothèse 1 : Le Putsch réussit et l'ingérable Erdogan disparait comme le rapprochement Ankara-Moscou
  • Hypothèse 2 : Le putsch échoue et la cavalerie de l'Oncle Sam vient faire le ménage elle-même...

Problème : comment légitimer une telle intervention étasunienne?

Réponse : En diabolisant la répression post-putsch menée par Erdogan et en invoquant un prétexte souverain indiscutable pour intervenir en Turquie comme par exemple éviter l'utilisation terroriste d'un arsenal nucléaire...

Et c'est là que la propagande de guerre occidentale nous sort le cocktail au top du top de la peur : terrorisme + nucléaire !!!

C'est tellement énorme comme scénario qu'il en devient crédible, d'autant plus que les médias occidentaux qui ne sont plus à un délire près, sont en train de faire décoller la peur d'un détournement d'ogives nucléaires au profit de Daesh, comme le Wall street journal par exemple qui explique que : "Bien qu’Incirlik possède probablement plus d’armes nucléaires que la plupart des autres bases de l’Otan, elle n’a pas d’avions adéquats permettant de les délivrer. Les bombes sont donc entreposées dans la base en sous-sol, attendant d’être utilisées ou détournées. […] En quelques heures et avec les bons outils et le bon entraînement, vous pouvez ouvrir une des enceintes de stockage des armes nucléaires et vous emparer d’une arme […]. En quelques secondes, vous pourriez placer un engin explosif au-dessus de l’enceinte, détruire l’arme et déclencher un nuage nucléaire”


Entre un Sultan qui profite de ce coup d'état pour régler ses comptes, une Maison Blanche furieuse que Ankara regarde à nouveau vers Moscou, la Turquie est devenu le nouveau volcan en éruption de cette région du Moyen Orient déjà en fusion...

La pièce maîtresse de l'OTAN dans cette région du Monde s'est fissurée au moment où les USA engagent une nouvelle confrontation majeure avec la Russie...

De quoi rendre furax l'Oncle Sam et heureux Vladimir Poutine qui prend ici un nouvel avantage autant dans sa lutte contre Daesh, son soutien à la Syrie au Sud que dans l'équilibre de la Mer Noire dont le Bosphore est contrôlé par Ankara...

Erwan Castel

L'analyse de Pepe Escobar

Le lien ici : Le Saker francophone

La sainte colère du sultan Téflon

Par Pepe Escobar – Le 17 juillet 2016 – Source : Sputnik News

Lorsque l’avion du président turc et aspirant sultan Recep Tayyip Erdogan a atterri à l’aéroport Atatürk à Istanbul au petit matin samedi, il a déclaré que la tentative de coup d’État contre son gouvernement était un échec et un « cadeau de Dieu ».  

Apparemment, Dieu utilise Face Time. Car c’est grâce à un appel vidéo emblématique au moyen d’un iPhone − à partir d’un lieu indéterminé retransmis en direct sur CNN par une présentatrice abasourdie − qu’Erdogan a pu dire à sa légion de partisans de descendre dans les rues, de montrer la force du pouvoir populaire et de défaire la faction armée qui avait occupé la télévision d’État et annoncé avoir pris les commandes.

Les voies de Dieu sur mobile étant impénétrables, l’appel d’Erdogan a été entendu même par les jeunes Turcs qui ont protesté farouchement contre lui au parc Gezi, qui ont été réprimés par sa police à l’aide de gaz lacrymogène et de canons à eau et dont le parti au pouvoir (AKP ou Parti de la justice et du développement) les dégoûte. Tous étaient prêts à l’appuyer contre ce coup « d’État militaire fasciste ». Sans oublier que pratiquement toutes les mosquées du pays ont relayé l’appel d’Erdogan.

La version officielle d’Ankara est que le coup d’État a été perpétré par une petite faction armée télécommandée par le leader religieux exilé en Pennsylvanie Fethullah Gülen, un atout dont dispose la CIA. Bien que sa responsabilité reste à démontrer, il est évident que le putsch constituait un épisode remixé des Trois Corniauds. En fait, les véritables corniauds pourraient bien être le commandant de la 2e armée, le général Adem Huduti (déjà détenu), le commandant de la 3e armée Erdal Ozturk et l’ancien chef d’état-major de la Force aérienne Akin Ozturk.

Comme d’ex-agents de la CIA surexcités le débitaient sur les réseaux américains – et ils s’y connaissent en matière de changement de régime − la règle numéro un du coup d’État consiste à viser et à isoler la tête du serpent. Sauf que dans ce cas-là, le rusé serpent turc restait introuvable. Qui plus est, aucun grand général n’est venu expliquer de façon patriotiquement convaincante sur le réseau d’État TRT les raisons du coup d’État.

Il y a de l’amour (pour Erdogan) dans l’air

Les putschistes ont visé les services secrets – localisés principalement à l’aéroport d’Istanbul, au palais présidentiel à Ankara et à proximité des ministères. Ils ont utilisé des hélicoptères Cobra – dont les pilotes ont été formés aux USA – pour frapper leurs cibles. Ils ont aussi visé le haut commandement de l’armée – nommé depuis huit ans par Erdogan et dont se méfient bon nombre de militaires de niveau intermédiaire.

Lorsqu’ils ont occupé les ponts sur le Bosphore à Istanbul, ils semblaient être en contact avec la police militaire dont les membres, répartis dans toute la Turquie, sont reconnus pour leur esprit de corps. Mais au bout du compte, ils n’étaient pas assez nombreux et mal préparés. Tous les principaux ministères, ainsi que les services secrets, semblaient communiquer entre eux pendant le déroulement de l’action. Quant à la police turque dans son ensemble, elle est devenue aujourd’hui une sorte de garde prétorienne de l’AKP.

Pendant ce temps, le Gulfstream 4 d’Erdogan, vol numéro TK8456, a décollé de l’aéroport de Bodrum à 1h43, puis a volé au-dessus du nord-ouest de la Turquie avec ses transpondeurs en fonction, sans être inquiété. C’est de l’avion présidentiel, avant le décollage, qu’Erdogan a lancé son message sur Face Time. Il a ensuite préparé sa réplique au coup d’État une fois l’avion dans les airs. L’avion n’a jamais quitté l’espace aérien turc – il était bien visible des radars civils et militaires. Les F16 des putschistes auraient pu facilement le suivre ou le réduire en cendres. Ils ont choisi plutôt d’envoyer des hélicoptères militaires bombarder la demeure présidentielle à Bodrum bien après qu’il eut quitté les lieux.

La tête du serpent devait être absolument certaine que monter à bord de son avion et rester dans l’espace aérien turc était aussi sûr que manger un baklava. Plus étonnant encore, le Gulfstream a pu atterrir à Istanbul en toute sécurité au petit matin samedi, malgré l’idée répandue voulant que l’aéroport fût occupé par les rebelles.

À Ankara, les rebelles ont eu recours à une division mécanisée et à deux commandos. Autour d’Istanbul, il y avait une armée au complet. Le 3e commandement est intégré aux forces de réaction rapide de l’OTAN. Il a fourni les chars Leopard placés aux points névralgiques d’Istanbul qui, soit dit en passant, n’ont pas ouvert le feu.

Pourtant, les deux principales forces armées placées en bordure de la frontière avec la Syrie et l’Iran sont restées en mode d’attente. Puis à 2 heures, la 7e armée basée à Diyarbakir – chargée de combattre la guérilla du PKK – a exprimé sa loyauté envers Erdogan. C’est à cette heure précise et cruciale que le premier ministre Binali Yildırım a annoncé l’imposition d’une zone d’exclusion aérienne au-dessus d’Ankara.

Ce qui signifiait qu’Erdogan contrôlait le ciel. La partie était alors terminée. Les voies de l’Histoire étant impénétrables, la zone d’exclusion aérienne au‑dessus d’Alep ou de la frontière syro-turque dont Erdogan rêvait tant a fini par se matérialiser au‑dessus de sa propre capitale.

Réunissons les suspects habituels

La position des USA a été extrêmement ambiguë dès le départ. Au moment du putsch, l’ambassade américaine en Turquie a parlé d’un « soulèvement turc ». Le secrétaire d’État John Kerry, qui était à Moscou pour parler de la Syrie, a aussi sécurisé ses paris. L’OTAN était totalement muette. Ce n’est qu’une fois qu’il était bien évident que le putsch avait foiré que le président Obama et ses alliés de l’OTAN ont officiellement déclaré leur « soutien au gouvernement démocratiquement élu. »

Le sultan est revenu en force dans l’arène. Il est aussitôt apparu en direct sur CNN Turk pour demander à Washington de lui livrer Gülen, sans même posséder la moindre preuve qu’il ait fomenté le putsch. Il a ensuite fait peser cette menace : « Si vous désirez conserver votre accès à la base aérienne d’Incirlik, vous devrez me le livrer. » Il est difficile de ne pas faire le parallèle avec l’histoire récente, lorsque le régime Cheney en 2001 a demandé aux Talibans de livrer Oussama ben Laden aux USA sans avoir de preuve qu’il était responsable des attentats du 11 septembre.

Même si elle a de quoi étonner, l’hypothèse numéro un est la suivante : les services secrets d’Erdogan savaient qu’un coup d’État se préparait et le rusé sultan a laissé aller les choses, en sachant que le putsch serait un échec, car les conspirateurs avaient très peu d’appui. Il se peut aussi qu’il ait su – à l’avance – que même le Parti démocratique des peuples (HDP) pro-Kurde, dont il tente d’évincer les députés du Parlement, appuierait le gouvernement au nom de la démocratie.

Deux autres faits ajoutent de la crédibilité à cette hypothèse. Plus tôt la semaine dernière, Erdogan a signé un projet de loi conférant l’immunité de poursuites aux soldats qui participent à des opérations de sécurité intérieure (lire anti-PKK), signe d’une amélioration des relations entre le gouvernement de l’AKP et l’armée. La principale entité judiciaire de la Turquie (HSYK ) a aussi évincé pas moins de 2 745 juges à l’issue d’une réunion extraordinaire tenue à la suite de la tentative de putsch. Cela ne peut que signifier que la liste avait été établie à l’avance.

La conséquence géopolitique immédiate de l’après-tentative de coup d’État, est qu’Erdogan semble avoir miraculeusement reconquis sa « profondeur stratégique », pour reprendre les mots de l’ancien premier ministre Davutoglu, qui a été mis de côté. Cette reconquête est à la fois externe – après l’échec lamentable de ses politiques au Moyen-Orient et envers les Kurdes – et interne. À toutes fins pratiques, Erdogan contrôle maintenant le pouvoir exécutif, législatif et judiciaire. Il ne fera pas non plus de quartier dans son épuration de l’armée. Mesdames et Messieurs, attendez-vous à ce que le sultan casse la baraque.

Ce qui veut dire que le projet néo-ottoman tient toujours, mais qu’il est maintenant soumis à une réorientation tactique majeure. L’ennemi véritable, ce n’est pas la Russie et Israël (ni même Daesh, qui ne l’a jamais été en fait), mais bien les Kurdes syriens. Erdogan en veut aux Unités de protection du peuple (YPG), qu’il considère comme une simple extension du PKK. Son ordre du jour est d’empêcher par tous les moyens la création d’une entité étatique autonome au nord-est de la Syrie – un Kurdistan établi comme un second Israël avec le soutien des USA. Pour y parvenir, il doit établir une forme d’entente cordiale avec Damas, en affirmant avec force que la Syrie doit conserver son intégrité territoriale. Ce qui implique aussi, évidemment, une reprise du dialogue avec la Russie.

À quoi joue la CIA au juste?

Il va sans dire qu’un affrontement entre Ankara et Washington est maintenant inévitable. Si l’Empire du Chaos est dans le coup – il n’y a aucune preuve tangible en ce sens pour l’instant – c’est sûrement du côté des néoconservateurs, et de la CIA à l’intérieur du périmètre, qu’il faut se tourner, et non vers le canard boiteux qu’est devenue l’administration Obama. Pour l’instant, l’influence d’Erdogan ne se limite qu’à l’accès à Incirlik. Mais sa paranoïa gonfle comme un ballon de baudruche. Pour lui, Washington est doublement suspect, en raison de son soutien aux YPG.

Il ne faut pas non plus sous-estimer le sultan dans sa sainte colère. Malgré toutes ses folies géopolitiques récentes, le rétablissement simultané de ses liens avec Israël et la Russie est on ne peut plus pragmatique. Erdogan sait qu’il a besoin de la Russie pour que la construction du gazoduc Turkish Stream et des centrales nucléaires se concrétise. Il a besoin aussi du gaz naturel israélien pour consolider le rôle de la Turquie comme carrefour énergétique clé entre l’Orient et l’Occident.

En apprenant que l’Iran a accordé son soutien à la « défense courageuse de la démocratie » par la Turquie, comme l’a tweeté le ministre des Affaires étrangères Zarif (un élément crucial), il est clair qu’Erdogan, en quelques semaines seulement, a complètement reconfiguré l’ensemble du tableau régional. Tout converge vers l’intégration eurasiatique et un profond intérêt pour les nouvelles Routes de la soie, au détriment de l’OTAN. Pas étonnant que ce soit la panique à l’intérieur du périmètre à Washington, où Erdogan est considéré par la très grande majorité comme le proverbial allié imprévisible et peu fiable. Le rêve de se retrouver avec des colonels turcs sous les ordres directs de la CIA est maintenant brisé – pour l’avenir prévisible du moins.

Puis qu’en est-il de l’Europe? Yildirim a déjà dit que la Turquie songe à rétablir la peine de mort, afin de l’imposer aux putschistes. Ce qui se traduit pour l’essentiel par bye bye UE. Bye bye aussi à l’approbation, par le Parlement européen, des déplacements sans obligation de visa pour les ressortissants turcs visitant l’Europe. Après tout, Erdogan a déjà obtenu ce qu’il voulait de la chancelière Merkel, c’est-à-dire ces six milliards d’euros pour contenir la crise des réfugiés qu’il a lui-même provoquée. Merkel a tout misé sur Erdogan. Aujourd’hui, elle rumine, pendant que le sultan a un accès direct à Dieu grâce à Face Time.

Pepe Escobar est l’auteur de Globalistan : How the Globalized World is Dissolving into Liquid War (Nimble Books, 2007), Red Zone Blues : a snapshot of Baghdad during the surge (Nimble Books, 2007), Obama does Globalistan (Nimble Books, 2009), Empire of Chaos (Nimble Books) et le petit dernier, 2030, traduit en français.

Traduit par Daniel, relu par Catherine pour le Saker Francophone

samedi 23 juillet 2016

Une déclaration de guerre à la Russie

Une analyse juridique de la déclaration de l'OTAN à Varsovie 


Ce sommet de l'OTAN a été voulu, et s'est déroulé en application d'une stratégie russophobe étasunienne destinée à mobiliser les pays européens dans une croisade militaire anti-russe que la propagande politique et les représailles économiques préparent depuis plus de 2 ans.

Dès sa préparation, le ton est donné, et les responsables occidentaux prétextant de la crise ukrainienne et de l'aggravation du front dans le Donbass accuse sans appel la Russie de "vouloir  démanteler l’Europe et à diviser ses nations" 

Plus tard au moment du sommet de l'OTAN à Varsovie, si le premier jours des discours d'intentions diplomatiques font bonne figure, le masque tombe dès le lendemain avec notamment la réunion de la "Commission OTAN-Ukraine" qui est un véritable réquisitoire inquisitorial russophobe reprenant mot pour mot la propagande de guerre kiévienne accusant la Russie d'être à l'origine de la crise ukrainienne.

Enfin la déclaration finale de ce sommet de l'OTAN, dont le le fond et la forme ne font que confirmer la russophobie psychotique et obsessionnelle de Washington, constitue une véritable déclaration de guerre lancée contre Moscou !

Aujourd'hui, le coup d'état manqué en Turquie qui apparaît dans la stratégie étasunienne comme un chien dans un jeu de quilles, risque de jouer le rôle d'accélérateur dans l'offensive contre la Russie, et les récents événements des fronts syrien et ukrainien confirment que l'escalade militaire jouée jusqu'à aujourd'hui par procuration se rapproche surement d'une confrontation directe entre Washington et Moscou.

En effet, n'en déplaise aux crispés qui continuent à vouloir regarder Erdogan comme un pion étasunien au Moyen Orient jouant avec l'OTAN et Daesh pour le plus grand bien des intérêts anti-russes et anti-syriens de Washington, les vents de la géopolitique ont tourné ou plus exactement sont revenus pousser le bateau turc vers un cap à l'Est.

Pour les USA déjà mis à mal par la défaite de l'opposition en Syrie, l'enlisement économico-militaire du gouvernement ukrainien, le Brexit, la déconfiture de Clinton (l'amie de l'opposant turc Gülen) face au candidat Trump, etc... semblent aujourd'hui groggy par ce coup d'Etat en Turquie et surtout, au vu des réactions médiatiques, par son échec qui ne fait qu'accélérer son rapprochement avec la Russie !

La Maison Blanche est obligée désormais de naviguer à vue et surtout d'accélérer sa stratégie anti russe dans une fuite en avant car sinon elle va se désagréger totalement sans combattre...

Erwan Castel


Source de l'article le lien ici : Le Saker francophone

Communiqué du Sommet de l’OTAN à Varsovie : 
préparer le crime d’agression


Par Christopher Black – Le 18 juillet 2016 – Source New Oriental Review

J’ai été avocat de la défense la plus grande partie de ma vie professionnelle et je n’ai pas l’habitude de recueillir des preuves pour engager des poursuites, mais les circonstances m’ont incité à ouvrir un dossier pour le procureur de la Cour pénale internationale, ou peut-être un futur tribunal citoyen. Ce dossier contient la preuve que les dirigeants de l’OTAN sont coupables du plus grave crime contre l’humanité, le crime d’agression. Je voudrais partager avec vous quelques brèves notes intéressantes provenant de ce fichier, que je soumets à votre réflexion.

L’Article 8bis du Statut de Rome, le statut régissant la Cour pénale internationale, stipule :

Aux fins du présent Statut, on entend par « crime d’agression » la planification, la préparation, le lancement ou l’exécution par une personne effectivement en mesure de contrôler ou de diriger l’action politique ou militaire d’un État, d’un acte d’agression qui, par sa nature, sa gravité et son ampleur, constitue une violation manifeste de la Charte des Nations Unies.

Le communiqué de l’OTAN publié à l’issue du congrès de Varsovie le 9 juillet est la preuve directe d’une telle planification et préparation et donc d’une conspiration par les dirigeants de l’OTAN pour commettre des actes d’agression contre la Russie. Cela ferait l’objet d’un acte d’accusation de la Cour pénale internationale contre les dirigeants de l’alliance militaire si la procureure de la CPI était effectivement indépendante, ce qu’elle n’est pas. Et bien sûr, si les articles relatifs aux crimes d’agression étaient en vigueur, ce qui ne se produira pas avant le 1er janvier 2017, le cas échéant, sous les articles du Statut de Rome.

Néanmoins, le problème technique de la juridiction qui empêche l’émission d’une inculpation contre les dirigeants de l’OTAN en ce moment, ne légitime pas la planification et la préparation d’actes d’agression contenus dans le communiqué de l’OTAN ni ne réduit le poids moral du crime d’agression défini dans le Statut et les principes de Nuremberg, parce que le crime d’agression est le crime de guerre suprême.

Selon leurs propres mots, imprimés en noir sur blanc dans leur communiqué du 9 juillet, les dirigeants de l’OTAN, chacun d’entre eux, et les états-majors entiers des forces armées de chacun des pays de l’OTAN, sont coupables du crime d’agression. Le fait qu’il n’y ait pas d’organe efficace devant lequel ils puissent être traduits en justice est sans rapport avec le fait du crime commis. Ils sont les ennemis de l’humanité et, inculpés ou non, ils sont des hors-la-loi internationaux qui doivent être identifiés en tant que tels et appelés à rendre des comptes à leurs propres peuples.

La preuve de leurs crimes est bien évidemment antérieure à ce communiqué et consiste en années d’actes commis par les puissances de l’OTAN depuis que l’Union soviétique s’est dissoute ainsi que le Pacte de Varsovie, en vertu de l’accord dit Acte fondateur OTAN–Russie de 1997, selon lequel l’OTAN ne s’étendrait dans aucun des pays formellement membres du Pacte de Varsovie ou de l’URSS, ni n’y installerait d’armes nucléaires. L’OTAN a continuellement brisé cet accord depuis lors et a commis, en tant qu’organisation ou par des groupes de ses États membres, des actes d’agression contre la Yougoslavie, l’Afghanistan, l’Irak, la Libye, la Russie (pendant l’attaque de la Géorgie contre l’Ossétie du Sud et en soutenant les groupes terroristes tchétchènes en Russie même), l’Ukraine et la Syrie, chaque acte d’agression étant appuyé par des campagnes de propagande massives pour tenter de justifier ces crimes en répandant cette propagande auprès des peuples qu’ils sont censés informer.

Ces mêmes puissances ont commis et commettent d’autres actes d’agression contre la République populaire démocratique de Corée, l’Iran et la Chine, et augmentent continuellement leur planification et leur préparation pour agresser ces pays. Ces plans sont aussi étalés dans le communiqué de l’OTAN, mais la plus grave menace pour l’humanité est la menace existentielle immédiate contre la Russie, contre laquelle la partie principale de ce communiqué est dirigée.

Le communiqué de l’OTAN est de fait une déclaration de guerre à la Russie. Il n’y a pas d’autre manière de l’interpréter.

Il y a plusieurs mois, j’ai déclaré que nous pouvions considérer l’accumulation des forces de l’OTAN en Europe de l’Est, le coup d’État de l’OTAN qui a renversé le gouvernement de Ianoukovitch en Ukraine, la tentative de s’emparer de la base navale russe à Sébastopol, les attaques immédiates contre les civils ukrainiens dans les provinces orientales qui refusaient d’accepter le coup d’État de l’OTAN, la propagande constante contre la Russie en tant qu’agresseur et la guerre économique menée contre la Russie sous couvert de sanctions est l’équivalent d’une seconde Opération Barbarossa, le nom donné à l’invasion de l’Union soviétique par le Troisième Reich en 1941. J’hésitais à le décrire ainsi, mais les faits étaient là et d’autres ont reconnu maintenant que l’analogie est correcte. Et exactement comme les dirigeants du Troisième Reich ont été finalement tenus pour responsables de leurs crimes à Nuremberg, les dirigeants du nouveau Reich que les Américains et leurs États vassaux projettent d’imposer au reste d’entre nous devraient l’être aussi.

Au paragraphe 5 du communiqué et après, ils commettent la première partie de leur crime en définissant de prétendus actes agressifs de la Russie, dans lesquels, dans tous les cas, ils sont les véritables agresseurs.

Au paragraphe 15, ils déclarent, après quelques sornettes à propos du partenariat entre l’OTAN et la Russie :

« Nous regrettons que malgré des appels répétés des Alliés et de la communauté internationale depuis 2014 pour que la Russie change de cap, les conditions à cette relations n’existent pas actuellement. La nature des relations de l’Alliance avec la Russie et les aspirations à un partenariat seront subordonnées à un changement clair et constructif des actions de la Russie, qui doit démontrer son respect du droit international et de ses obligations et responsabilités internationales. Jusque là, nous ne pouvons pas revenir au business as usual. »

Ce qu’ils veulent dire en parlant du changement de cap de la Russie est, bien sûr, qu’elle fasse ce qu’ils ordonnent, et le « respect du droit international » ne signifie rien d’autre que de se plier aux diktats de l’OTAN. Le monde a vu ce qui est arrivé à la Yougoslavie quand le président Milosevic a eu le courage de lui dire d’aller se faire voir, alors que Madelaine Albright lui présentait sa longue liste de revendications, y compris l’occupation de la Yougoslavie par les forces de l’OTAN et le démantèlement du socialisme, suivi par le choix d’obéir ou d’être bombardé. Le gouvernement yougoslave avait le droit et, en plus,  le courage, de la défier, et donc les dirigeants de l’OTAN ont activé les casseurs de jambes, les exécuteurs et les assassins qui servent dans leurs armées et ont commencé la destruction massive d’un membre fondateur du Mouvement des non-alignés.

Nous l’avons vu à nouveau en Afghanistan, envahi sous le prétexte juridique qu’il hébergeait un supposé criminel, Ben Laden, qui n’a jamais été accusé de crime [accusé, si. Reconnu coupable, jamais. NdT] et qui travaillait sous le commandement de l’armée étasunienne au Kosovo en 1998-1999, luttant contre le gouvernement yougoslave.

Nous l’avons vu avec l’Irak, sommé de remettre des armes qu’il n’a jamais eues, puis attaqué avec choc et effroi, une démonstration de puissance militaire conçue non seulement pour l’Irak mais pour le monde entier : voilà ce que nous vous ferons si vous ne jouez pas le jeu.

Nous l’avons vu avec le président Aristide à Haïti en 2004, lorsque des soldats américains et canadiens l’ont arrêté en pointant les fusils sur lui et l’ont exilé, l’enchaînant en Afrique, pendant que le monde regardait ailleurs. Nous l’avons vu en 2010, lorsque le président Laurent Gbagbo a été arrêté par les Français et jeté dans les marécages de la Cour pénale internationale. Nous l’avons vu en 2011, lorsque l’OTAN a détruit la Libye socialiste et nous voyons aujourd’hui comment ils tentent la même chose contre la Syrie et l’Irak, l’Iran, la Corée du Nord, la Chine et, le plus important, contre la Russie.

Le paragraphe 15 n’est rien d’autre qu’un diktat, « obéis-nous ou nous ne pourrons pas retourner au statu quo » ce qui signifie, en fin de compte, la guerre.

Suit alors une longue série de paragraphes pleins de mensonges et de distorsions sur des événements tous imputés à la Russie. Ils savent que ce sont des mensonges et des distorsions, bien sûr, mais le principe est que ces communiqués sont générés à Washington comme outils de propagande destinés à être cités encore et encore dans les médias occidentaux et mentionnés par leurs diplomates et leurs politiciens dans tous les discours.

Au paragraphe 15 et ensuite, ils se réfèrent à leurs plans pour leur nouvelle Opération Barbarossa, l’accumulation des forces de l’OTAN en Europe de l’Est. Ils l’appellent le Plan de préparation à l’action. En d’autres termes, tous ces paragraphes exposent leurs plans pour préparer leur capacité logistique et stratégique dans le but d’attaquer la Russie. Qu’ils aient l’intention de le faire est maintenant clair, avec le placement de systèmes anti-missiles en Pologne et en Roumanie et bientôt sur le flanc sud-est de la Russie en Corée, des missiles destinés à garantir le succès d’une première frappe atomique sur la Russie par les forces nucléaires de l’OTAN. Les systèmes anti-missiles sont conçus pour intercepter tous les missiles de représailles lancés par les survivants en Russie. Mais, comme le président Poutine l’a relevé, ils peuvent aussi être utilisés directement de manière offensive.

Ils soulignent ensuite que les armes nucléaires sont une partie importante de leur stratégie, et déclarent dans le paragraphe 53 :

« La position de l’OTAN en matière de dissuasion nucléaire repose aussi, en partie, sur les armes nucléaires déployées en avant par les États-Unis en Europe et sur les capacités et l’infrastructure fournies par les Alliés concernés. » La crainte est qu’avec les récents exercices en Pologne et dans l’Arctique − dans lesquels l’usage de frappes aériennes pour lancer des armes nucléaires telles que des missiles de croisière nucléaires pointés sur la Russie − a joué un rôle important − les États-Unis et leurs alliés de l’OTAN projettent et préparent une attaque nucléaire sur la Russie. C’est la seule conclusion possible, puisqu’il est clair que la Russie n’a aucune intention d’attaquer aucun pays en Europe de l’Est ou ailleurs. Donc l’excuse donnée que la présence d’armes nucléaires en Europe est une dissuasion contre l’agression russe est clairement un mensonge et, par conséquent, leur présence ne peut avoir qu’un seul but : être utilisées pour une attaque.

La preuve est devant nous, le dossier est complet. Il est posé sur un bureau, il prend la poussière, il n’est d’aucune utilité pour personne, excepté le tribunal de l’opinion publique, et qu’est-ce que ça vaut, ces jours ci ? Mais peut-être que quelqu’un, là-bas, le prendra, le mettra au point et le donnera à un tribunal, peut-être quelqu’un du peuple, pour le peuple, mis en place par le peuple, pour juger ceux qui projettent de détruire le peuple, qui peut agir rapidement avant que le crime d’agression final soit commis contre la Russie ; contre nous tous.

Christopher Black 

Christopher Black est un juriste pénaliste international basé à Toronto, il est membre du Barreau du Haut-Canada et il est connu pour un grand nombre de cas très médiatisés portant sur les droits humains et les crimes de guerre, en particulier pour le magazine en ligne New Eastern Outlook.

Traduit par Diane, vérifié par Wayan, relu par Catherine pour le Saker francophone